Aperçu général
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La conquête de Mossoul[1]
- La campagne de Mossoul est réalisée à partir de plusieurs directions : L'armée irakienne a avancé du Sud tandis que les forces kurdes des peshmergas et les forces anti-terroristes de l'armée irakienne attaquent de l'Est. Les forces kurdes opèrent également au Nord de la ville. Les premiers jours de l'attaque ont été caractérisés par uneavancée rapide des forces. Cependant, plus tard, leur progression a été ralentie en raison des opérations de l'Etat islamique, principalement dans la zone située au Sud de Mossoul. Les médias arabes ont rapporté que les forces assaillantes avaient repris environ 80 villes et villages pendant huit jours de combats. Ces forces ont atteint les banlieues Est et Nord de Mossoul, tout en étant engagées dans le nettoyage des poches de résistance à l'arrière.
- A l'Est et au Nord-Est de Mossoul opèrent les forces kurdes peshmergas et les forces d'élite irakiennes (la force de lutte anti-terroriste). Ces forces ont libéré deux grandes villes, Ba'shiqah, située à environ 13 km au Nord-Est de Mossoul, et Bartella, à environ 13 km à l'Est de Mossoul. Les médias irakiens ont rapporté que les forces irakiennes anti-terroristes opérant dans cette région se trouvent maintenant à environ 5 km à l'Est de Mossoul. Les forces kurdes ont libéré la ville de Batnay, située à environ 15 km au Nord de Mossoul.
- L'Etat islamique a jusqu'à présent répondu à l'offensive de plusieurs façons :
- Des opérations de guérilla pour ralentir l'avancée des forces. L'organisation a recouru à des terroristes suicide, a fait exploser des voitures piégées, a miné des routes, et tiré de obus de mortier, des tirs d'artillerie et des missiles antichars. En outre,des membres de l'Etat islamique ont mis le feu à des puits de pétrole, à des fossés remplis d'essence et de pneus, afin que la fumée empêche l'exécution de frappes aériennes et ralentisse l'avancée des forces. En outre, une usine de soufre a été incendiée à Mishraq, à environ 40 km au Sud de Mossoul. Un nuage jaune de soufre toxique s'est propagé dans la région (des centaines de résidents locaux doivent recevoir un traitement médical en raison de difficultés respiratoires, de brûlures oculaires et d'asphyxie).
- Renforcement du système de défense autour de Mossoul : Des membres de l'Etat islamique ont piégé des ponts et miné les routes principales menant de la rive Ouest du Tigre à la rive Est. Il a également été rapporté que la plupart des membres de l'organisation se sont déplacés vers la rive Est du fleuve. Selon nous, cette mesure est une réponse aux efforts offensifs des peshmergas et des forces irakiennes à l'Est de Mossoul. En outre, les membres de l'Etat islamique ont installé trois lignes de défense à la périphérie de la ville, ont miné des voitures et se préparent à commettre des attentats suicide, y compris en utilisant des adolescents (cf., les lionceaux du Califat) (Al-Arabiya 24 octobre 2016).
- En plus de sa réponse directe à l'offensive, l'Etat islamique a lancé trois vastes attaques de guérilla entre le 21 et le 24 octobre 2016 dans les villes de Kirkouk, Rutba et Sinjar, qui sont éloignées des scènes de combat de Mossoul. Leur but était de détourner les ressources et l'attention de l'offensive sur Mossoul, de remonter le moral des membres de l'Etat islamique, et de démontrer que l'organisation est toujours en possession de capacités opérationnelles importantes, même face à la forte pression qu'elle subit. La machine de propagande de l'Etat islamique a largement couvert ces attaques, a menacé les forces attaquant Mossoul d'une guerre d'usure prolongée, et a appelé les partisans de l'organisation dans le monde à attaquer les "infidèles" pour aider l'État islamique.
Principaux développements en Syrie
La ville d'Alep et ses environs
- Dans le Nord d'Alep et dans le secteur des collèges militaires au Sud-Ouest de la ville, des affrontements locaux ont eu lieu entre l'armée syrienne et les organisations rebelles. Ces affrontements, auxquels le Front Fatah al-Sham (anciennement le Front Al-Nusra) a pris part, n'ont pas conduit à des changements significatifs sur le terrain. Dans le même le temps, les avions russes et syriens ont poursuivi leurs frappes aériennes à Alep et à ses environs.
- Après trois semaines de combats dans la ville d'Alep, la Russie a annoncé un cessez-le-feu temporaire de 8h à 16h le 20 octobre 2016. L'armée syrienne et l'armée russe étaient censées arrêter toute action offensive. Les Russes ont annoncé qu'au cours du cessez-le-feu, plusieurs voies seraient ouvertes pour permettre aux forces rebelles et aux civils assiégés de quitter la ville. Dans le même temps, l'armée russe a annoncé qu'elle était prête à discuter de toute initiative pour une solution à la crise dans la ville.
- Le 18 octobre 2016, le ministère russe de la Défense a annoncé que dans le cadre des préparatifs en vue de la trêve temporaire, les avions de combat russes allaient arrêter leurs frappes aériennes contre des cibles dans la ville d'Alep. Selon le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou, la cessation des frappes aériennes visait à permettre aux forces rebelles de quitter la partie orientale de la ville qui était sous leur contrôle. Lest Etats-Unis, l'ONU et l'Union européenne ont salué l'annonce, mais ont clairement fait comprendre que le délai fixé ne permettrait pas de fournir une aide humanitaire à la population. La Russie a annoncé qu'elle allait prolonger le cessez-le-feu de trois heures, mais a ajouté qu'elle n'accepterait aucune demande de prolongation. Finalement, la Russie a prolongé le cessez-le-feu de deux jours supplémentaires.
- Les organisations rebelles ont répondu par un refus total de se retirer et se sont abstenues de quitter la ville pendant le cessez-le-feu. La plupart des civils n'ont pas répondu à l'appel à quitter la ville. Les organisations rebelles auraient empêché la population de quitter la partie orientale de la ville. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a mentionné devant le secrétaire d'Etat américain que des "groupes armés" dans l'Est d'Alep ont ouvert le feu sur des civils essayant de tirer profit du répit dans les combats pour quitter la ville (Spoutnik, 24 octobre 2016). Il a accusé le Front Fatah al-Sham et Ahrar al-Sham d'empêcher les civils de quitter la ville au moyen "d'extorsion, de menaces et de violence".
- Le 24 octobre 2016, à la fin de la trêve, des affrontements entre les forces syriennes et les organisations rebelles ont été signalés. Selon l'observatoire syrien des droits de l'homme, les frappes aériennes russes et syriennes ont repris. La Russie a nié les informations sur la reprise des frappes aériennes.
La zone à l'Ouest de l'Euphrate : Dabiq
- Dans la zone à l'Ouest de l'Euphrate, les organisations rebelles soutenues par l'armée turque continuent la troisième phase de l'opération Bouclier de l'Euphrate. L'objectif de la phase actuelle est de reprendre la ville d'Al-Bab, dernier bastion de l'Etat islamique à l'Ouest de l'Euphrate. Jusqu'à présent, l'Etat islamique n'a pas montré de résistance significative.
- Le 16 octobre 2016, des membres de l'Armée syrienne libre et d'Al-Jabha al-Shamiya ont repris la ville de Dabiq.Comme indiqué dans les médias turcs, les forces assaillantes ont été aidées par le soutien aérien de la Turquie et des forces de la coalition (Hurriyet.com.tr, 17 octobre 2016). Dabiq a une signification symbolique pour l'Etat islamique : dans cette ville, selon la tradition musulmane, les armées musulmanes vont affronter les armées infidèles à la fin des jours et l'emporter (sorte d'Armageddon). Cette ville a signification symbolique pour la Turquie aussi.[2] De Dabiq, les forces de l'Armée syrienne libre, assistées par l'armée turque, ont continué à se déplacer vers Al-Bab, dernier bastion à l'Ouest de l'Euphrate. Les organisations rebelles soutenues par la Turquie sont censément à une distance d'environ 15 km au Nord-Ouest de Al-Bab. Selon les rapports, elles ont affronté les forces des SDF à majorité kurde.
Région du plateau du Golan
- Le 21 octobre 2016, l'armée Khaled bin al-Walid a indiqué que son commandant Abu Hashem al-Shami a été tué dans l'explosion d'un engin explosif improvisé activé par des organisations rebelles alors qu'il circulait sur la route entre Abedin et Jamla, au Sud du plateau du Golan syrien, près de la frontière entre la Syrie, la Jordanie et Israël (Twitter, 22 octobre 2016).
L'Egypte et la péninsule du Sinaï
- Le 22 octobre 2016,le général Adel Rajai, commandant de la neuvième division blindée de l'armée égyptienne a été abattu devant son domicile par des assaillants à moto dans la ville d'Al-U'bour, à une trentaine de kilomètres au Nord-Est du Caire. Un groupe appelé Liwa al-Thawra (Brigade de la révolution) a revendiqué la responsabilité de l'assassinat (Al-Masri al-Yawm, 22 octobre 2016). Adel Rajai servait au Nord du Sinaï et était responsable de la destruction des tunnels entre l'Egypte et Gaza.
- Suite à sa mort, l'armée égyptienne a lancé le 23 octobre 2016 une opération militaire intensive contre des militants de la branche du Sinaï de l'Etat islamique, notamment au Nord de la péninsule du Sinaï et dans les secteurs d'El Arish, cheikh Zoweid et Rafah. Les médias égyptiens ont rapporté que 28 terroristes ont été tués, 54 arrêtés et des bases et des véhicules terroristes et des motos de toutes sortes ont été détruits. Plus tôt (21 octobre 2016), l'armée de l'air égyptienne a attaqué 24 bases terroristes au Nord du Sinaï et les forces terrestres ont mené des opérations militaires intensives contre les militants de l'Etat islamique dans le Sinaï. 21 terroristes ont été tués et 21 motos ont été détruites ainsi que des explosifs, prêts à être utilisés contre les forces de sécurité égyptiennes (Page Facebook du porte-parole de l'armée égyptienne, 21 octobre 2016).
Le jihad dans d'autres pays
Libye
- Les forces du gouvernement libyen de consensus national continuent d'éroder les zones contrôlées par l'Etat islamique dans la ville de Syrte. Cette semaine, les forces libyennes ont terminé leur prise de contrôle du quartier des "600 bâtiments" et ont continué à progresser vers le quartier de la "marine", le dernier avant-poste majeur occupé par l'Etat islamique. Les forces libyennes ont libéré six otages étrangers détenus par l'organisation (un médecin indien et cinq infirmières philippines). Les forces libyennes ont aussi libéré plus de vingt civils, dont trois ressortissants turcs et 11 femmes érythréennes, détenus par l'Etat islamique.
Pakistan
- Le 25 octobre 2016, la Province de Khorasan de l'Etat islamique a annoncé que trois terroristes suicide de l'organisation ont attaqué le centre de formation de la police dans la ville pakistanaise de Quetta, dans l'Ouest du Pakistan (non loin de la frontière de l'Afghanistan). Les assaillants portaient également des gilets explosifs, des armes de petit calibre et des grenades. Ils ont échangé des coups de feu avec des policiers pakistanais pendant plusieurs heures. A la fin de l'attaque, ils se sont fait exploser dans le centre d'un groupe de policiers. Plus de soixante personnes ont été tués et 120 blessées (Aamaq, 25 octobre 2016). L'identité des assaillants reste inconnue[3].
[1]Une étude détaillée de la reprise de Mossoul et de ses conséquences sera prochainement publiée.
[2]Dans la zone de Dabiq a eu lieu, le 24 août 1516, une grande bataille où l'Empire ottoman a remporté une victoire sur les Mamelouks (la bataille de Marj Dabiq). Sultan Selim I a dirigé les forces ottomanes, au nombre d'environ 65 000 soldats, contre les forces mamelouks d'environ 80.000 soldats. La victoire ottomane a ouvert le chemin de Damas et sa prise de contrôle par l'Empire ottoman, et par la suite la reprise de la Grande Syrie (Al-Sham) et l'Egypte des Mamelouks. L'opération Boulier de l'Euphrate a commencé le 24 août, marquant le 500ème anniversaire de la bataille menée près de Dabiq.
[3]La branche Karachi des talibans au Pakistan a également revendiqué la responsabilité de l'attaque.